Limnionas : paradis par hasard
« Ne baisse jamais les bras, le miracle peut se produire la seconde d’après », a-t-on lu un jour. Passons les détails de la longue liaison entre Thasos et Limnionas. Contentons nous d’évoquer deux escales et quelques anecdotes.
Vous n’irez pas au mont Athos !
Première escale sur une falaise tout près de la frontière interdite du mont Athos où, arrivés au bout de la route, nous nous retrouvons bloqués, ignorants que nous sommes.
Femmes interdites à moins de 300 mètres du rivage !
Presqu’île montagneuse culminant à plus de 2 000 mètres, le mont Athos est un territoire ultra conservateur régi par les moines orthodoxes, une terre chrétienne fermée aux mineurs, aux eunuques ainsi qu’à absolument tout être femelle… sauf les chattes ! Et ce malgré une demande de l’Union européenne. La République monastique du mont Athos n’est accessible qu’à un quota annuel d’hommes munis d’une autorisation officielle décrochée au terme d’un long dédale administratif. Mais… Maryse Choisy y est allée !
Une française sur le mont Athos (en une phrase)
En se documentant pour l’occasion on apprend qu’une femme parfaitement extraordinaire, Maryse Choisy, poétesse, psychanalyste, sur-idéaliste, philosophe, oculiste, mystique, orientaliste, professeur de yoga, peintre, aviatrice, dompteuse et journaliste d’investigation avant l’heure, fondatrice dans les années 20 de la revue Psyché, parvint à y vivre un mois déguisée en homme, dût même y repousser des avances (!) pour en tirer « Un mois chez les hommes », livre phare d’une série d’enquêtes savoureuses telles que « Un mois chez les filles » en immersion dans une maison close, « L’amour dans les prisons », etc.
Bref ! De notre falaise, on voit passer au réveil les premières navettes de pèlerins super chanceux et les bateaux mixtes venus admirer du large les monastères accrochés à la falaise.
Porto Koufos
Seconde halte le lendemain soir, à Porto Koufos, petite baie parfaitement ronde entourée de collines et littéralement cachée du large par deux grandes falaises en arc de cercle.
Super mouillage, décor de repère de pirates avec une plage bien sale, une sorte de havre lacustre et un tout petit port de pêche comptant quelques voiliers en escale, loués par des étrangers, quelques barques de pêche et quatre restaurants de fruits de mer.
Le lendemain nous longeons le spectaculaire mont Olympe, 2 917m, montagne sacrée elle aussi, décidément ! Et hop, douze heures de route jusqu’à la prochaine halte nocturne improvisée.
Destination Evia, une longue île méconnue reliée au continent au nord par un bac et au sud un pont qui conduit à Athènes. Toute proche de la capitale, elle n’en demeure pas moins peu fréquentée.
Nous visons la côte est qui, d’après la carte routière (sic) est assez sauvage.
Nous n’avons pas photographié (à tort) les montagnes de déchets accumulées par bennes entières sur la partie sauvage de ces somptueuses plages (où nous pensions dormir) car la Daupmobile dut procéder à deux dépannages.
La Daupmobile dépanne un marchand de matelas (qui cherchait un coin tranquille avec sa meuf).
La Daupmobile dépanne ensuite la dépanneuse (elle-même venue dépanner le marchand)
Sacrée Daupmobile !
Le lièvre
La nuit tombe, la fatigue est palpable, mais dégoûtés par une immondice manifestement institutionnelle nous poursuivons à la recherche d’une belle escale. Et le désespoir de la trouver grandit. Il est plus de 23 heures lorsque nous décidons d’emprunter une piste finissant en impasse, un lent et hasardeux parcours à flanc de falaise… Si quelqu’un arrive en face, on est mal. Enfin non, on a de l’eau et des vivres, de quoi tenir !
Ici, tout ralentit.
Et de suivre quelques minutes un lièvre acculé entre le vide à gauche et la falaise à droite. Après douze heures de quête, on se gare dès que nos phares trouvent une bifurcation du chemin vers un terrain plus large. Nous atterrissons au pied d’une chapelle.
La tortue
Réveillés à sept heures par une toute petite vieille femme en fichu noir toute courbée qui psalmodie « agué Dimitriouuu, agué Dimitriouuu, agué Dimitriouuu ». Rengaine pieuse qui ajoute un brin de mystère à ce coin hyper isolé où nous ne rencontrerons personne, royaume de quelques bergers vivant accrochés au dessus des flots. Elle vient faire ses dévotions depuis la petite maison en contrebas. C’est dimanche, nous craignons une messe : compliqué de croiser une voiture arrivant en face, dans le coin.
Saint Dimitri, donc
Une fois amadoués les chiens de berger qui gardent ce territoire à force d’aboiements, nous quittons cette terrasse, bien décidés à aller au bout d’une piste dont on ne voit pas la fin. La carte indiquait pourtant une impasse. Nous avançons lentement, nous arrêtons pour laisser traverser une belle tortue.
Tout s’arrête.
Sans le savoir, en empruntant le chemin le plus difficile (il y a une petite route récemment goudronnée), on atteint le paradis de la mer et du camping sauvage : Limnionas.
Endroit propre, site grandiose fréquenté uniquement par des Grecs qui viennent y camper les week-ends. Nous y resterons une grosse semaine, rythmée par les baignades, les amitiés, les pêches, un bon coup de vent, notre premier (et unique) Ouzo grec servi sur la plage par un gars extraordinaire, Giannis, dont Armelle a réalisé une petite interview (ici). Bref, un vrai beau bivouac, calme et reposant, résumé ici en photos.
Plus de vagues ici
Une pensée pour Manfried et Lisa : hope your trip is giving you lots of good vibrations guys! It was great sharing those moments with you!
Un peu plus sur Giannis ici.
Longue vie à Christos, qui possède la résidence secondaire la plus anarchique, originale, destroy et surtout la mieux placée du monde, en haut de la plage de Limnionas.
Yassas !
Premier rinçage d’une Daupmo crassouille, et en route : Go West !